États-Unis : la justice réduit à 175 millions de dollars la caution que doit payer Donald Trump


CHRISTIAN MONTERROSA / AFP / GETTY IMAGE

Dans le bras de fer qui l’opposait à la justice new-yorkaise, Donald Trump a remporté une manche importante. Lundi, une cour d’appel a consenti à réduire la caution judiciaire qu’il devait déposer de 454 millions à 175 millions de dollars, dans le sillage de son procès pour fraudes.

Un panel de cinq juges lui offre une bouée de sauvetage quasi inespérée : non seulement elle préserve sa solvabilité supposée, mais elle lui accorde dix jours de répit pour garantir cette somme d’argent trois fois inférieure à l’amende redoutée.

L’ancien président républicain risquait de voir ses comptes bancaires gelés, ses biens immobiliers saisis et revendus, à commencer par son gratte-ciel au 725 de la Ve Avenue, en plein cœur de Manhattan, s’il ne déposait pas ce lundi une garantie de 468 millions de dollars (355 millions, plus 100 millions d’intérêts, et un taux d’intérêt de 9 % alourdissant la barque de 120.000 dollars par jour, selon le site http://trumpdebtcounter.com/).

La caution dûment acquittée lui permettrait de faire appel du jugement imposé à l’issue de son procès pour fraudes à New York par le juge Arthur Engoron. L’adversaire de Joe Biden avait été reconnu coupable d’avoir systématiquement surévalué ses biens et son empire immobilier, la Trump Organization, entre 2011 et 2021, afin d’obtenir des prêts plus avantageux auprès des institutions financières.

L’effeuillage de sa carapace commence, et il permettra de découvrir que Donald Trump n’a pas de vêtements financiers, du moins pas le genre de vêtements financiers qu’il prétend avoir eus

Tim O’Brien, éditeur chez Bloomberg et ancien journaliste d’investigation financière pour le New York Times

L’affaire n’avait rien d’une bagatelle : l’homme qui, en 2016, plastronnait en affirmant peser « plus de 10 milliards de dollars » ne disposait pas de la somme initialement réclamée en liquidités. « Nous sommes en 2024, et il est sur le point d’être démasqué, résumait Tim O’Brien, éditeur chez Bloomberg et ancien journaliste d’investigation financière pour le New York Times. Cela va se faire lentement. Je ne pense pas qu’il y aura de psychodrame ce lundi. Mais l’effeuillage de sa carapace commence, et il permettra de découvrir que Donald Trump n’a pas de vêtements financiers, du moins pas le genre de vêtements financiers qu’il prétend avoir eus. »

À en croire les avocats de Trump, une trentaine de compagnies d’assurances auraient refusé d’avancer la somme manquante. D’après un document judiciaire de 5000 pages mis en ligne la semaine passée par la section d’appel du tribunal de première instance, ceux-ci arguaient que garantir une telle somme était « quasiment impossible », au vu des réactions parmi les prêteurs sollicités. « Très peu de sociétés envisagent un bon de garantie proche de cette magnitude », qui correspond à 120 % de l’amende prévue, ajoutaient-ils.

Une bombe à retardement électorale

Le passé du promoteur immobilier expliquait ces réserves : Trump en est à sa sixième faillite. Il a notamment fermé une compagnie aérienne, trois casinos à Atlantic City, le Plaza Hotel à Manhattan, laissant clients et créditeurs le nez dans le gazon. La procureur générale, Letitia James, elle, lorgnait divers actifs plus stables : les parcours de golf de Doral, près de Miami, et de Bedminster, dans le New Jersey, ainsi qu’un jet privé et des hélicoptères.

La réduction de la caution permet donc au premier intéressé d’éviter une septième déclaration de faillite personnelle au titre du « chapitre 11 » (code des faillites). Celle-ci constituait une bombe à retardement électorale : Donald Trump étant déjà inculpé dans quatre affaires pénales et déjà condamné à de très lourdes amendes dans deux procès civils, elle aurait écorné auprès de ses supporteurs son image d’homme d’affaires fortuné et toujours en réussite.

Pour desserrer l’étau financier, Donald Trump faisait feu de tout bois. À ses partisans sur Truth Social, il avait adressé une supplique teintée des habituelles imprécations sur une supposée « chasse aux sorcières » : contribuer à la levée de fonds tout en désignant ses harceleurs, à commencer par la procureur générale James, qui serait une « tarée de gauchiste » et ne penserait qu’à saisir les luxueuses propriétés du trublion de Mar-a-Lago, pour mieux précipiter son retrait de la course présidentielle. « Les démocrates pensent que cela va m’intimider, éructe l’ancien promoteur. Ils pensent que s’ils s’emparent de ma fortune pour plomber ma campagne, je vais jeter l’éponge ! Mais il y a un truc qu’ils ne savent pas : nous n’abandonnerons jamais ! »

Une poignée de milliardaires sympathisants

Trump mise visiblement sur le soutien d’une poignée de milliardaires sympathisants, rencontrés en catimini : Elon Musk, Tim Mellon, Jeffrey Yass. Le Trump Media & Technology Group (TMTG), qui comprend le réseau Truth Social, entre en Bourse cette semaine à la faveur d’une fusion avec Digital World Acquisition Corporation (DWAC), contrôlé par la firme de Jeffrey Yass, Susquehanna International Group, et pourrait après six mois rapporter 3 milliards de dollars à Donald Trump.

Il lui faudra espérer remporter son appel à New York, et écarter la menace de saisie de ses actifs, toujours pendante. Si une telle confiscation devait survenir, prédit Stephanie Grisham, son ancienne porte-parole à la Maison-Blanche, « le 40 Wall Street (Trump Building, 72 étages) est probablement ce qu’il détesterait le plus perdre. Idem pour Mar-a-Lago, le golf de Bedminster ou même la Trump Tower. Ce sont ses bébés. »

LJL AVEC AFP

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